#Côte d’ivoire La CEDEAO est l’une des régions les moins électrifiées au monde, avec des variations de taux d’électrification d’un pays à l’autre allant de 15% à 93%. Pourtant, la région dispose d’importantes potentialités pour un accès universel à l’électricité.
La région de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) est l’une des régions où le taux d’accès à l’électricité est le plus faible au monde. Presque la moitié des 340 millions d’habitants de la région en sont privés. L’Afrique du Sud, avec 50.000 MW installés produit presque le double de la production d’électricité de l’ensemble de la région.
Si certains pays comme le Cap Vert dispose d’un taux d’électrification de plus de 92%, d’autres affichent les plus bas taux au monde. C’est le cas notamment de la Guinée Bissau (15%), du Niger (16%), du Burkina Faso (20%)… Le Ghana, le Sénégal et la Côte d’Ivoire figurent parmi les pays les plus électrifiés de la région avec des taux d’électrification respectifs de 79,3%, 76% et 64%.
Globalement, le niveau moyen d’électrification, qui tourne autour de 50%, constitue un handicap pour le développement des pays de la région.
Face à ce déficit, certains pays de la zone se sont regroupés pour produire de l’électricité. C’est le cas des pays de l’OMVS (Organisation de la mise en valeur du fleuve Sénégal), regroupant le Mali, le Sénégal, la Mauritanie et la Guinée, qui exploite le barrage hydroélectrique de Manantali, ou de ceux de l’OMVG (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie) comptant la Guinée, le Sénégal, la Gambie et la Guinée Bissau.
Pourtant, le potentiel de la région est exceptionnellement important. Elle compte de nombreux pays producteurs de pétroles et de gaz, dont le Nigéria, premier producteur de pétrole du continent. Ce dernier dispose également d’importantes réserves en gaz qui malheureusement ne sont pas exploitées, mais torchées lors de l’exploitation du pétrole. Un procédé qui fait perdre au pays 2,5 milliards de dollars par an. Les compagnies qui exploitent le pétrole utilisent le torchage pour éliminer les gaz inflammables inexploitables ou dont la récupération est peu payante. Le gouvernement nigérian a fini par interdir ce procédé en 2020 dans le but d’accroître la production électrique du pays. Outre le Nigéria, le Ghana, le Niger et la Côte d’Ivoire sont aussi des producteurs de pétrole et de gaz. Un cercle que devrait rejoindre aussi le Sénégal à partir de 2023 suite aux découvertes de ces hydrocarbures en offshore.
Mais, la région devrait surtout compter sur les énergies renouvelables dont le potentiel est inépuisable. La région détient un important potentiel d’énergie solaire avec des moyennes de rayonnement très élevées allant de 5 à 6 kwh/m2 tout au long de l’année. Toutefois, les installations de centrales solaires sont faibles. Idem pour l’éolien dont le potentiel est important au niveau de la région sahélienne et des côtes ouest-africaines. Mais à ce niveau aussi, les investissements sont timides malgré les potentialités et les avantages en matière de réduction des factures énergétiques qui plombent les balances commerciales des pays et rognent les faibles avoirs extérieurs en devises, alors que les investissements en solaires et éoliens, une fois réalisés, n’engendrent que des dépenses de maintenance.
Malheureusement, les énergies renouvelables sont faiblement exploitées au niveau de la région où la production d’électricité repose jusqu’à présent sur les énergies fossiles qui représentent autour de 90% du total de production électrique de la région.
A cela s’ajoute le potentiel hydroélectrique évalué à 25.000 MW dont moins de 20% sont exploités. La Guinée, considérée comme le château d’eau de l’Afrique de l’Ouest, a le plus grand potentiel de production hydroélectrique de la région, mais dispose d’un taux d’électrification faible de seulement 33,5%.
Certains pays ont toutefois fait le pari du renouvelable. C’est le cas du Sénégal qui investit dans le solaire et l’éolien. Mais le plus ambitieux de la région reste le Cap Vert, pays le plus électrifié de la CEDEAO, qui s’est engagé à l’horizon 2025 à produire la totalité de ses besoins en énergie à partir du renouvelable.
Au-delà de la production, le problème réside également dans la distribution de l’électricité avec des réseaux défaillants. C’est particulièrement le cas au Nigéria.
Nigeria: taux d’électrification faible à cause des défaillances du réseau
La première puissance économique africaine, qui pèse 70% du PIB de la CEDEAO, souffre d’un manque d’accès et de disponibilité électrique important. En effet, le pays le plus peuplé du continent affiche actuellement un taux d’électrification de 59%.
Selon les données disponibles, la capacité électrique installée tourne autour de 12.600 MW, composés essentiellement de capacités thermiques au gaz (81% du mix électrique) et hydroélectrique (19%). Toutefois, la capacité réellement disponible ne dépasse pas 5.000 MW, alors que le pays a besoin environ 20 GW pour satisfaire ses besoins. Cette situation s’explique par les importantes pertes du système électrique, estimées à plus de 40% de la production.
Pour faire face à la situation, le gouvernement avait privatisé le secteur en 2010. Toutefois, cette privatisation n’a pas eu les effets escomptés. Les coupures quotidiennes et les délestages récurrents, à cause de la défaillance des infrastructures de transport et de distribution, obligent une large partie de la population et la quasi-totalité des entreprises à se doter de moyens d’autoproduction, essentiellement des groupes électrogènes polluants. Selon certaines sources, la capacité en générateurs diesels privés serait ainsi comprise entre 15 et 20 GW.
Malgré un taux d’électrification faible, le Nigéria s’est engagé dans un programme d’accès universel à l’électricité à l’horizon 2030. Pour y arriver, l’Etat doit raccorder 500.000 à 800.000 ménages par an au réseau électrique sur la période 2018-2030.
Dans cet optique, le gouvernement a signé, avec Siemens en juillet 2019, un protocole d’accord pour la modernisation du réseau électrique, visant à augmenter la production électrique disponible à 25.000 MW à l’horizon 2025. De même, le gouvernement compte diversifier son mix énergétique en s’appuyant sur les énergies renouvelables (hydraulique, solaire et éolien), en particulier par la génération hors-réseau à hauteur de 12.500 MW d’ici 2030.
Le Nigéria doit donc consentir d’importants investissements afin d’accroître son taux d’électrification et réduire la pollution occasionnée par les générateurs privés.
Cap Vert: objectif 100% renouvelable en 2025
Le Cap Vert, un archipel situé à environ 644 km de Dakar (Sénégal), est le pays ayant le taux d’électrification le plus élevé de la CEDEAO. En effet, plus de 92,6% de la population de l’Etat insulaire a accès à l’électricité. Mieux, avec une consommation de 727 KWh par personne et par an, le Cap Vert affiche une consommation moyenne largement supérieure à celle de l’Afrique subsaharienne qui s’établit à 488 KWh.
Toutefois, face à la hausse de la consommation d’électricité dans l’archipel, qui est ainsi passée de 360 GWh à 670 GWh entre 2015 et 2020, les autorités ont décidé de faire le pari des énergies renouvelables afin de réduire la facture énergétique du pays. Elles se sont fixées un objectif de 100% d’énergies renouvelables à l’horizon 2025. Déjà trois îles, dont les deux plus peuplées de l’archipel, produisent déjà le quart de leur production d’électricité à partir des énergies renouvelables.
Il s’agit d’un pari réaliste quand on sait les potentialités que recèle le pays pour développer l’éolien, le solaire ou la géothermie. A titre d’exemple, concernant l’éolien, alors qu’il faut en moyenne des vitesses de vent d’au moins 6,4m/s à 50 mètres du sol, le Cap Vert dispose d’un atout de taille avec des vents pouvant dépasser les 9 m/s. Quant à la géothermie, le pays peut exploiter les ressources de ses îles volcaniques.
Sénégal: un exemple du mix énergétique
Le Sénégal investit fortement dans le secteur de l’énergie avec l’ambition affichée d’un accès universel à l’électricité à toute sa population à l’horizon 2025, contre un peu plus de 76% actuellement (94% en milieu urbain et 53,9% en milieu rural).
Pour y arriver, le pays a fait le pari du renouvelable. Il est d’ailleurs celui qui a le plus misé sur le renouvelable au niveau de la région avec 6 centrales solaires de 20 à 30 MW déjà opérationnelles et la plus grande centrale éolienne de l’Afrique de l’Ouest avec une capacité installée de 150 MW. En tout, les énergies renouvelables devraient représenter 30% des capacités électriques installées au Sénégal en 2021. D’autres centrales solaires sont aussi programmées dans les régions.
Les autorités comptent aussi investir dans le réseau de distribution d’électricité avec la construction de 819 km de lignes moyennes tensions et 2.466 km de lignes basse tension. Le réseau national sera étendu à 786 nouvelles localités à l’horizon 2025.
En plus des énergies renouvelables, le Sénégal compte aussi sur les découvertes de gaz et de pétrole dont l’exploitation est prévue à partir de 2023 pour accélérer la production électrique avec le lancement des centrales électriques en cours de réalisation tout en renforçant le mix énergétique.
Pour y parvenir, les autorités comptent lever, avec l’appui de la Banque mondiale 1,3 milliard de dollars pour des projets structurants en milieu rural et périurbain dans le but de soutenir l’électrification dans ces zones.
Source : Le 360